Jazz
Chat rôdeur autour de mon terrain, il se laissait
approcher et venait vers moi sur le devant de porte se
frotter contre mes jambes. Personne ne savait d’où il venait,
et madame ma voisine voulait l’attraper et le faire piquer par le
vétérinaire contre un Euro. C’est là que l’idée a germé que
peut être, si Le chat voulait de moi, je voudrais bien de lui.
Aussi un samedi, je mis une assiette de lait sur le devant de
porte.
Puis une autre le dimanche. Monsieur Le chat apparut, je
laissais la porte ouverte pour qu’il visite la maison, peut être
lui plairait elle. Il fit le tour du propriétaire et s’établit sur
le coussin en patchwork dans le salon. Il m’avait choisie. Au
début je laissais les portes ouvertes souvent puis un matin
découvrant que Le chat voulait faire ses besoins à l’intérieur,
j’achetais une litière, un collier, une pipette anti puces, des
croquettes.
Jazz m’avait adoptée. Je découvris ce matin-là seulement
lors de sa toilette minutieuse, que monsieur était une dame. Cela
ne change rien .Jazz se laisse caresser, dort sur mes coussins,
vient se faire câliner sur mon lit, se perche sur ma hanche sur le
canapé, observe mon jardin du haut d’un dossier de fauteuil
en écoutant ma musique, feule imperceptiblement au moindre moineau
qui passe derrière ma baie vitrée,  et a droit à une petite
gâterie sur mes repas Elle me fait la fête quand je rentre du
travail parce que c’est l’heure aussi d’un repas conséquent. Elle
rapplique au moindre bruit de coquille qu’on écale, car elle
raffole des œufs durs. Madame la vagabonde ne sort plus, elle
est devenue une chatte d’appartement tout ce qu’il y a de
plus correcte et de plus sage. Ah, Â j’oubliais, elle est
noire, avec un peu de blanc sous le ventre, sur la poitrine et sur
le bout des pattes de derrière. Elle a de grands yeux verts. On
dirait un majordome en tenue, une grande dame en smoking.
Et puis un jour où j’ai pris quelque temps de vacances Ã
la mer et où je la laissai à la garde de la voisine, elle disparut
.Comme elle était venue. Elle ne vint pas manger sa pitance malgré
la pluie dehors,  torrentielle. Dieu sait si je l’ai
cherchée et appelée, les larmes aux yeux et la culpabilité de
m’être absentée au ventre, je l’attends toujours.
Ma si tendre, ma si raffinée, ma si douce, mon air de jazz , ma
« lady sophistiquée », ma Jazz.
michèle rosenzweig-; « j’en parle à mon chat » proses
poétiquesÂ
Elle est toujours présente .
Dans et par vos mots.
J’aimeJ’aime